18 juin 2002

Plongeon catmarin


Les services météorologiques islandais semblent, malheureusement fiables. Je confirme, donc, la présence de vent avec bourrasques atteignant les 100km/h. Demain, si le temps s’améliore et si la température, actuellement de 3°C, daigne gravir les sommets inespérés des 5°C, nous irons voir une étudiante de Pall (Ester Rut Unnsteinsdottir) installée avec son mari à Horn, plus à l’est, derrière ce col masqué depuis presque une semaine derrière son voile de brume. De là, nous prendrons un hypothétique bateau (cela dépend de l’état de la mer) venant sauver le professeur et ses houailles pour, tous, nous ramener à Bolungarvik, situé à 15km au nord d’Isafjordur.
En attendant, et puisque nous sommes toujours coincés à Hlöduvik, il nous semble intéressant, au cours d’une courte ballade de procéder au relevé de l’avifaune présente au sein de cette vallée belle et glacée.

Rapidement, nous surprenons un couple de plongeons catmarins au superbe plumage gris, blanc et rouge batifolant dans les eaux froides d’une petite mare. Cette espèce, essentiellement arctique ne descend pas en dessous de l’Ecosse. C’est en surveillant les déambulations de ce couple d’oiseaux que nous eûmes la chance d’observer notre premier labbe parasite. Il s’agissait d’une forme claire (aux plumes blanches). En Islande, il existe également une forme foncée au plumage sombre, mais celle-ci est plus fréquente au sud du pays. Le labbe possède un comportement singulier. En effet, celui-ci pratique essentiellement le Kleptoparasitisme, c’est à dire qu’il poursuit les oiseaux marins (mouettes, pétrels, sternes et macareux) afin de leur dérober leurs proies.
Un peu plus tard, alors que nous grelottons en regardant nos doigts devenir bleus, V attire mon attention sur deux silhouettes trottinant dans la brume. Perplexes, nous nous approchons aussi discrètement que possible de ces formes intrigantes. Soudain, les deux volatiles nous apparaissent plus distinctement. c’est un couple de cygnes sauvages portant leurs noms à merveille car ils sont, hors réserve naturelle, extrêmement difficiles à approcher. Nous les photographions au moment où, nous ayant repérés, ils disparaissaient de nouveau dans l’épaisseur opaque du brouillard.
Grisés par ce succès, nous retournons en direction du refuge en longeant la plage. Lorsque nous étions à Flatey la semaine dernière, les femelles eiders couvaient leurs œufs. Désormais, ces derniers ont éclos et les poussins, adorables, suivent attentivement les adultes sur la mer démontée par la tempête qui fait rage.
Ils étaient accompagnés par de banals colverts. Si, un jour, nous retournons à Bordeaux et que nous décidons d’aller au parc il faudra que nous racontions aux enfants qui jetteront des cailloux sur quelques-uns de ces canards que leurs cousins, en Islande, et pendant que nous gelions dans nos blousons en fibres synthétiques, nous observaient sereins dans leurs plumages en nageant dans les eaux glacées de la mer du Groenland. Peut-être cela leur donnera envie de respecter d’avantage ces placides anatidés.