25 juin 2002

Platanthera hyperborea


Levé vers 10h30 puis café devant le match Corée/Allemagne. Rien à dire sinon à saluer le parcours de cette équipe coréenne très prometteuse pour l’avenir face aux vieillissantes formations européennes. L’Allemagne a cependant dominé et gagné sans surprises. On trace en stop vers la route numéro 1 pour nous rendre aux gorges de Kolugljofur vers Vididalstunga. On est pris assez rapidement par une jeune islandaise qui possède beaucoup de chevaux, vit à Reykjavik mais passe au nord du pays pour aller à la fête des chevaux vers Varmahlid durant laquelle les islandais s’adonnent à une consommation excessive d’alcool. Il est évident que ceci nous attire fortement mais la fête a lieu dans 15 jours et dans ce laps de temps, nous aurons effectué de nombreux kilomètres nous éloignant ainsi de cette tentante invitation à l’ivresse. Bref, la fille nous dépose à une dizaine de kilomètres des gorges. Nous marchons jusqu’à une cascade au niveau de laquelle la petite rivière que nous longions plonge dans la roche. V inspecte la flore et trouve une orchidée, tandis que je photographie un beau tapis de dryas octopetala. Nous décidons pour le retour de quitter la route et de longer ces gorges chacun d’un côté de la rivière. Les paysages ressemblent un peu au Puy de Dôme avec de nombreux volcans très érodés et recouverts d’une herbe d’un vert stupéfiant car très brillant. Quelques formations géologiques nous rappellent cependant que nous sommes en Islande et nous prenons de nombreuses photographies. V trace tranquillement et je le perds de vue. Je continue à marcher et je me retrouve rapidement sur une pente de graviers humides où mes pieds s’enfoncent me conférant une stabilité digne du dollar reaganien. Mais ce gravier humide devient de plus en plus sec et glissant. Mes pieds s’enfoncent de moins en moins et je finis par chuter. Je m’interroge alors sur la pertinence de mon choix quant au chemin emprunté. Cette voie semble biaisée. Je jette alors aux alentours un regard d’expert en randonnée. Devant moi du gravier, derrière moi du gravier, en haut une falaise et sous moi une autre falaise qui, elle, plonge vers la rivière. Pendant que je réfléchis à un moyen de m’en sortir, je glisse davantage vers le bas et soudain, mon pied d’appui n’appuie plus rien et je tombe et glisse le long de la pente. Malgré tous mes efforts, il faut que je me rende à l’évidence je vais me casser la gueule dans la falaise. Beaucoup de choses passent alors au travers de mon esprit. Je me dis que si la chute est de dix mètres, c'est le drame et si je ne tombe que de 2 m je n’aurai rien. Arrivé au moment de me vautrer, vision d’horreur. La falaise fait environ 5 m et en contrebas il n’y a que des rochers. Mon corps est totalement impuissant, je ne peux ni freiner ni arrêter ma chute.
Patatras comme on dit dans le jargon, je m’écrase comme un étron sur les rocailles et reste inconscient pendant quelques minutes.
A mon réveil, j’essaie de me remettre debout mais mes jambes sont très douloureuses. J’ai l’impression de n’avoir rien de cassé. Une goutte de sang tombe sur le sol, je saigne du nez. Afin d’y remédier, je me passe la tête sous l’eau fraîche de la rivière, mes jambes flageollent et le film de ma chute passe sans cesse dans mon esprit. Un peu choqué, je me mets à pleurer. J’ai les jambes molles et je crains de trouver sur mon corps gourmandé quelque chose de plus grave que les égratignures qu’il me semble avoir. Je récupère l’appareil photo que je portais en bandoulière. C’est un miracle mais le pare soleil et juste fendu. Indemnes nous rejoignons V qui dépoussière l’appareil, écoute mon récit et s’inquiète de mon état. Le retour se fera clopin boîtant jusqu’à la route numéro 1 où nous attendons le bus.
L’arrivée à Akureyri, après un petit arrêt à Blonduos, se fera dans le brouillard le plus total et sous une pluie battante. On plante la tente dans une petite forêt près de l’église puis j’écoute un peu de Pink Floyd avant de profiter de l’effet nuages-arbres qui abaisse un peu la luminosité ambiante pour me plonger dans un douloureux mais profond sommeil.

Chevaux sauvages