21 juillet 2002

Sur la route du Laki


Mais il nous faut la quitter cette petite ville sympathique, car c’est ce matin à 14 h 30 (?) que nous partons à pied pour le Laki (112 km aller-retour) les sacs blindés de bouffe.
Récit de 46 km à pied :

De 0 à 7 Km : Route numéro 1, le stop ne fonctionne pas et le bitume fait mal aux pieds. A gauche il y a une immense étendue de pseudo cratères formés en 934 lorsque l’Edgja (volcan fissural) entra en éruption et à droite se trouvent de nombreuses cascades.

De 7 à 14 Km : Nous quittons la route pour rejoindre une piste. Le stop ne marche toujours pas. Nous traversons un paysage très vallonné, très vert et qui contraste beaucoup avec ceux que nous côtoyons depuis le début du voyage. La marche est agréable.

De 14 à 21 Km : Le stop ne peut plus rien pour nous puisque aucune voiture ne passe depuis presque une heure. Nous marchons chacun à notre rythme et V est loin devant. On est bien, chacun dans ses pensées. Je chante du Cabrel à tue-tête. On fait une pause riz dans une ferme abandonnée. Le paysage est toujours très vert et il y a de nombreux moutons qui broutent tout autour de nous. Le coucher du soleil confère aux vallons de magnifiques tons dorés que l’on grave au burin sur nos pellicules photographiques. Même les canyons et les falaises en orgue basaltique paraissent adoucis par cet immense pâturage. On repart sans autre but que celui de marcher.

De 21 à 25 Km : Les mêmes que depuis des heures. Mes pieds deviennent un peu douloureux mais ça va. On monte en altitude imperceptiblement et quelques rochers recouverts de mousses parsèment un peu l’étendue d’herbes qui nous entoure. On passe un gué où l’eau est moins froide que d’habitude et le courant plus faible qu’à Thingvellir ou Hornstrandir, mais les cailloux ça fait toujours mal aux pieds. On continue.

De 25 à 35 Km : La douleur est partie du pied gauche. Mes plantes de pied se sont tassées depuis un bout de temps et je sens comme des brûlures à chaque pas. Un peu plus tard, la souffrance s’est insinuée dans mes mollets et est remontée jusqu’à mes cuisses. Il est rigolo de discerner les différences entre les douleurs vives au niveau des pieds et celles plus diffuses ressenties aux tendons et aux muscles des jambes. Je suis devenu une machine à marcher. On s’arrête près d’une petite rivière avant une montée sur un plateau rocailleux. Il y a là un endroit idéal pour planter Jamet mais partant du principe que plus on marche aujourd’hui moins on marchera demain, on boit un café et on continue.

De 35 à 46 Km : Il fait assez sombre, on en déduit qu’il est tard. Le pluvier silencieux jusqu’à présent se manifeste désormais et commente de ses PUP notre lente décrépitude. Le plateau est effectivement rocailleux et les pierres éclairées par la lune prennent une allure inquiétante. L’ambiance est lugubre mais bizarrement le moral ne fléchit guère. Des Bruants des neiges passent devant nous tels de petits fantômes. Il n’y a aucun endroit pour la tente à perte de vue et il faudra tout le talent de V pour dénicher dans l’ombre un lac bordé de cendres volcaniques, terrain qu’il estime propice au plantage des sardines. Jamet acquiesce alors, on boit une soupe et on s’endort.

V et Jamet